Article paru dans Les Echos le 26 octobre 2016 sur la société FERRAND

Dans le sillage des Louboutin et Repetto déjà présents, d’autres marques tricolores cherchent à se faire connaître en Chine.

La scène se passe au Kerry Center, l’un des plus récents « shopping malls » de Shanghai. En cette fin d’après-midi de semaine, on ne s’écrase pas dans ce temple dédié à la consommation de luxe occidental. Petite animation autour des stands de l’expo et du « pop-up store » de la Fédération française de la chaussure. Abonnées au magazine de mode en ligne Shanghaï Won, des jeunes femmes en chaussures Louboutin et sac Hermès, grignotent des macarons et essaient des ballerines made in France. En Charente précisément, près d’Angoulême où elles sont fabriquées par la société Ferrand. Spécialiste de la pantoufle, l’entreprise a eu la bonne idée d’en tirer un modèle de ballerines pliables vendues depuis 2012 en Chine sous la marque Villebois. Mais les choses ne se sont accélérées que deux ans plus tard quand Sophie Marceau accepte d’en être l’égérie. La star, associée à la réussite de DS dans l’empire du Milieu, « a été séduite par notre projet », explique Claire Gérard, chargée du déploiement local de la marque. L’actrice a même signé la « Frenchie » avec ruban tricolore qu’elle portait à un match de l’Euro 2016. Mais son aura n’aurait pas suffi à lancer Villebois.

S’adapter à l’exigence de confort

A moins de s’appeler Saint Laurent ou Roger Vivier, mieux vaut s’adapter à la préférence forte des Chinoises pour le confort. Sans sacrifier la féminité. « Ici on aime le brillant, le strass et les couleurs vives », constate la jeune femme. Claude-Eric Paquin, président de la fédération, espère voir se multiplier ce genre d’initiative. « Il y a une désaffection certaine des Chinois pour les grosses marques qui ont exagéré au niveau des prix. Il y a aussi une attente pour des produits que l’on n’a pas vus partout. Appréciés pour leur créativité, les Français ont une carte à jouer », estime le dirigeant. Le style, plus qu’une fabrication 100 % française (devenue anecdotique), compte aux yeux de la fédération. Et pour servir de tremplin aux marques, cette dernière a ouvert une vitrine permanente à Shanghai, Maison S ou la Maison de l’excellence française, dont les frais sont partagés avec sa consoeur de l’horlogerie. Située au coeur du quartier très prisé des anciennes concessions, cette jolie demeure particulière sert de lieux d’exposition aux marques en quête de partenaires.

Passer par un distributeur local

« C’est indispensable ici. Le marché est si grand et les coûts d’approche si élevés qu’il faut un minimum de 50 points de vente pour devenir rentables », observe Claude-Eric Paquin. L’assortiment de Maison S est éclectique allant des marques masculines et « tradi », Heschung, Paraboot, au plus féminines et tendance comme Parallèle. Présents aussi, Tanya Heath, qui s’est lancée avec ses escarpins à talons interchangeables, Ernest, le bottier du Crazy Horse, ainsi que des TPE sponsorisées par ADC (Au-Delà du Cuir), la structure d’aide à la création de la fédération : Elodie Bruno et ses souliers « chaussons » de cuir tressé, Gordana Dimitrijevic et ses extravagantes sandales du soir. « L’idéal serait de disposer de « french corners » dans les grands magasins », remarque Claude-Eric Paquin.

Dans le sillage des Louboutin et Repetto, certaines marques se son t lancées avec le concours de distributeurs locaux. JB Martin dispose de 22 points de vente sous la forme de corners dans les grands magasins Isetan et Takashimaya. Après un premier essai peu concluant avec Galeries Lafayette, Mellow Yellow (groupe Eram) s’est associé à la chaîne Golden Eagle et a ouvert une dizaine de corners situés non pas dans les mégalopoles mais dans les « petites » villes chinoises (de plus de 1 million d’habitants quand même !) La palme dans ce domaine revient à Arche, connu en Chine sous la marque Achette. Au côté de son associé David Meng, le groupe familial a investi dans une usine sur place et est présent dans 140 points de vente. Assez pour ressentir les effets du coup de froid sur la consommation chinoise. « Grâce à Internet, nous espérons éviter une baisse des ventes cette année », espère toutefois David Meng.

Modérer les prix

Internet a un effet modérateur sur le prix des produits étrangers, confirme Claude-Eric Paquin. « Les gens comparent les prix et voient qu’ils sont beaucoup moins élevés en Europe et aux Etats-Unis », dit-il. « Les marques de luxe avaient l’habitude de doubler leur prix. C’est beaucoup plus difficile maintenant. Au-delà de 50 % de majoration, les Chinois se sentent arnaqués », observe-t-il.

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